Même si le redoublement a de moins en moins de succès, cette réalité est toujours actuelle et le redoublement fait partie du décor quotidien. Redoubler ? On s'en fiche un peu, quand la menace est loin de nous. Mais c'est bien différent quand elle se rapproche. Aïe, la mauvaise nouvelle se profile… L'idée de redoublement est mise sur le tapis, en cours d'année, ou alors elle est confirmée avant les grandes vacances d'été…
Que vous reste-t-il à faire ? Cette épée de Damoclès est-elle inexpugnable, ou bien peut-on éloigner le calice grâce à des cours particuliers ? Voyons ce qu'il en est d'un point de vue légal pour une contestation redoublement scolaire.
Les derniers textes de loi sur le redoublement
Avant même de parler de textes de loi, il est nécessaire de faire un rappel important : le redoublement ne se décide pas à l'échelle fédérale, mais à l'échelle cantonale. Ainsi, selon le canton où vous vous trouvez, les règles ne sont pas toujours les mêmes.
Fort heureusement, le site de l'EDK/CDIP1 a publié un résumé de la politique des cantons quant au redoublement durant la scolarité obligatoire. Voici ce qu'il en est :
Ecole enfantine
"Dans la plupart des cantons, il est en principe possible de redoubler à l’école enfantine, voire d’y suivre une troisième année, par exemple en raison d’un retard de développement ou de circonstances personnelles particulières. La répétition (redoublement volontaire) n’est prévue que dans une minorité de cantons."
Degré primaire (années 3-8)
"Dans tous les cantons, il est possible de redoubler une ou plusieurs années scolaires. La majorité des cantons indique que le redoublement est dû à des performances scolaires insuffisantes et/ou à des circonstances personnelles difficiles (par ex. longue maladie). La répétition (redoublement volontaire) n’est possible que dans une minorité de cantons. Redoubler la dernière année du degré primaire (8e année) est souvent soumis à des critères plus restrictifs que redoubler les années 3-7."
Degré secondaire I
"Il est également possible de redoubler une année du degré secondaire I dans tous les cantons. Certains ne l’autorisent toutefois que si des circonstances personnelles difficiles le justifient. Dans certains cantons, le passage à une filière scolaire moins exigeante est privilégié. Dans quelques cantons, la dernière année de la scolarité obligatoire (11e année) ne peut pas être redoublée tandis que, dans d’autres cantons, elle ne peut l’être que si des circonstances personnelles particulières le justifient. Dans un gros tiers des cantons, la 11e année peut être redoublée volontairement."
Concernant le gymnase, là aussi tout dépend du canton, mais si vous observez les chiffres du redoublement en Suisse en 2025, vous verrez par exemple que le canton de Genève a remarqué que le taux de redoublement diminue au fil des années de scolarité du degré secondaire II. Dans tous les cas, redoubler ne doit advenir qu'à l'issue "d'une phase de dialogue préalable".
Qui décide de l'orientation d'un élève ?
Les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d'éducation à donner à leurs enfants.
article 26 (§3) de la Déclaration universelle des droits de l'homme de l'ONU
Cependant, dans les faits, les choses ne sont pas aussi simples, dès lors que la Confédération intervient dans l'instruction des jeunes générations en mettant en place un système scolaire à proprement parler. Toutefois, vous l'avez compris, l'institution qui décide n'est pas fédéral, mais cantonal. Il va s'agir plus précisément du département de l'instruction publique du canton. C'est ce département qui détermine :
- Si le redoublement est permis
- A quelles conditions
- Les modalités
Une fois ce cadre légal établit, ce sont les instances internes à l'établissement scolaire qui décident si un.e élève doit ou non redoubler, en se basant sur divers critères, tels que les résultats scolaires, la maturité émotionnelle ou encore les difficultés personnelles. Il s'agit donc :
Des enseignants
De la direction
Ainsi, en Suisse, le canton jouit d'un véritable pouvoir de délégation et a son mot à dire dans l'orientation des enfants. L'accord des parents est quant à lui considéré selon le canton pour une contestation redoublement scolaire.
Au degré primaire
Comme vous le savez, le degré primaire comprend maintenant l'école enfantine. Il est donc question des 8 premières années de scolarité obligatoire de l'enfant. En règle général, le redoublement dans le degré primaire est en principe possible au sein de tous les cantons.
À chaque fin d'année scolaire, un conseil de maîtres se réunit par établissement pour se prononcer sur la suite de la scolarité de chaque élève : passage en classe supérieure, redoublement ou, plus rarement, saut d'une classe. Le conseil des maîtres est donc composé des enseignant.e.s et du directeur ou de la directrice de l'école.
Vous l'aurez compris, le conseil de maîtres est décisionnaire dans le choix du redoublement de l'élève ou bien de le faire passer dans la classe supérieure.
Le degré secondaire I
Là encore, le redoublement est possible dans l'ensemble des cantons. Dans le cycle d'orientation, qui constitue également la fin de la scolarité obligatoire, les enjeux sont de taille. En effet, comme son nom l'indique, c'est à cette période de leur scolarité que les élèves vont choisir les filières dans lesquelles s'orienter et ainsi poursuivre leur apprentissage en formation post-obligatoire.
Plus un élève a un projet professionnel défini et plus il fera montre de motivation, mieux les choses se passeront. Le pire serait qu'on lui propose une orientation qu'il ne désire pas lui-même, ce qui pourrait le destiner à un métier dans lequel il ne s'épanouira pas.
Toutes les situations ne se valent pas et sont loin d'être tranquilles. Nous avons nous-même connu un élève en difficulté scolaire qui désirait être boulanger. Orienté vers la voie professionnelle adéquate, une allergie à la farine de blé s'est déclarée… Imaginez tout le chemin, difficile à vivre, qu'il a fallu parcourir en sens inverse !
Ainsi, sachez qu'en cycle d'orientation, le redoublement, bien que possible, n'est pas automatique. Il s'agit réellement d'un "cas par cas" qui va dépendre des résultats scolaires, de l'attitude en classe, la maturité de l'élève ou encore son projet. D'ailleurs, certains cantons, comme alternative au redoublement, favorisent une réorientation au sein d'une filière moins exigeante.
De ce fait, au cycle d'orientation, la décision est prise par le conseil des enseignants, ainsi que par la direction en fin d’année ou en fin de cycle.
Pensez-vous qu'il faut accepter le redoublement au degré secondaire I ?
Le degré secondaire II
Les conseils des enseignants au gymnase prennent volontiers l'allure de jurys, tant les enjeux sont importants avec la maturité à décrocher pour étudier à l'université. Les jeux se font dès la première année, où les élèves doivent commencer à réfléchir aux options qu'ils vont choisir lors des années suivantes.
La pression des parents peut être énorme, et ce sont alors eux qui, paradoxalement, peuvent demander un redoublement pour que leur enfant fasse de nouveau ses preuves en maths, en lettres, etc. (aidé par exemple par des cours particuliers), tout en leur donnant l'occasion de repartir sur un dossier scolaire vierge, pensant déjà à l'orientation après la maturité.
La décision du redoublement revient, comme pour le degré primaire et secondaire I à la direction de l’établissement et à l’équipe enseignante, sur la base des règlements internes, c'est-à-dire en se référant aux notes ou encore aux examens semestriels.
Par ailleurs, comme cela a déjà été mentionné, rappelez-vous qu'au gymnase, le redoublement est certes possible, mais moins fréquent. A vrai dire, tout dépend du canton, de l'établissement et des réglements internes.
En outre, il peut arriver qu'au lieu d'un simple redoublement, l'établissement peut proposer à l'élève un "semestre de transition" ou encore des solutions alternatives, tel qu'une réorientation, qu'il s'agisse des options ou même d'un changement de filière. Une fois encore, tout dépend du canton.
Recours possibles ?
Ne vous laissez pas abattre par une décision de redoublement (ou non promotion) si vous n'êtes pas d'accord. Différentes issues s'offrent à vous si vous désirez émettre une contestation redoublement scolaire – le légalisme est le meilleur moyen d'obtenir gain de cause.
Dans le degré primaire et secondaire I
Il y a 3 étapes à suivre pour votre recours. La première consiste en une opposition, et donc, une demande de réexamen. Cette étape est interne à l'école. Concrètement, les parents peuvent demander :
Une révision de la décision auprès de la direction de l’établissement
Une audition (souvent obligatoire dans certains cantons, comme le Jura)
Si la décision ne satisfait pas les parents, ceux-ci peuvent alors procéder à la deuxième étape, qui consiste à saisir une instance cantonale. Ce recours est prévu dans la loi ou dans les règlements de promotion selon votre canton.
L'instance cantonale varie selon le canton où vous vous trouvez. Pour Genève et Vaud, il s'agit du Département cantonal de l’instruction publique. Du côté de Fribourg, Valais et Neuchâtel, vous devez vous adresser à l'Autorité scolaire régionale. Enfin, si vous êtes dans le Jura, est question du Département de la Formation.
Enfin, la dernière étape, c'est-à-dire la troisième, si vous n'êtes toujours pas en accord avec le verdict et souhaitez poursuivre votre contestation redoublement scolaire, concerne les tribunaux administratifs cantonaux. D'ailleurs, ne vous inquiétez pas, ils sont habitués à traiter régulièrement des recours de non-promotion.
Ainsi, le tribunal administratif cantonal rend sa décision finale si l'un des ces deux critères est rempli :
1er critère
vous avez contesté la décision de l’école + la décision de l’administration cantonale
2e critère
vous avez invoqué une violation du droit cantonal ou un abus
Dans le degré secondaire II
Dans le degré secondaire II, les décisions de promotion sont dites recourables. Tout d'abord, vous devez demander un réexamen auprès de la direction. Si l'issue ne vous est pas favorable, alors il faudra vous adresser vers une commission de recours scolaire ou directement vers l'autorité cantonale compétente. Enfin, dernière étape, comme pour le degré primaire et secondaire I, vous pouvez vous diriger vers le tribunal administratif du canton.
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Quelques exemples concrets de recours
L'exemple du canton du Jura
Le Règlement concernant l’orientation, la promotion et le redoublement du canton du Jura concernant le secondaire I prévoit 4 étapes clairement définies :
Etape 1
L'audition des parents
Etape 2
Le recours à la direction
Etape 3
Le recours au Département de la Formation
Etape 4
Le Tribunal administratif
L'exemple du canton de Vaud
Le canton de Vaud est soumis à la LEO (Loi sur l'enseignement obligatoire). Il y est dit que toute décision de promotion peut faire en premier lieu l'objet d'un recours auprès de la direction. Ensuite, vous pouvez vous adresser à la DGEO, qui est la Direction générale de l'enseignement obligatoire. Enfin, vous le savez, la dernière étape est le tribunal administratif, plus exactement à Vaud, la Cour de droit administratif et public.
L'exemple du canton de Genève
Du côté du canton de Genève, il faut se référer à la LIP, la Loi sur l'instruction publique. En effet, cette loi prévoit :
1er élément
Une décision motivée
2e élément
Un droit d’être entendu
3e élément
Un recours administratif auprès du Département de l’instruction publique
4e élément
Un recours judiciaire au Tribunal administratif de première instance
L'exemple du canton de Fribourg
Dans le canton de Fribourg, les décisions de non-promotion sont recourables selon la Loi scolaire et suivent trois étapes :
L'opposition auprès de la direction
Le recours auprès de l’autorité scolaire régionale
Le recours auprès de la juridiction administrative
*
Les équipes pédagogiques n'ont donc pas le dernier mot en matière d'orientation et de redoublement. Elles ne font qu'émettre un avis préalable. Les parents ont le choix entre l'entériner ou entrer en scène pour rejeter la proposition, ce qui requiert de passer par des instances cantonales puis par des tribunaux administratifs. C'est ce dernier qui a le mot de la fin.
Quand bien même la menace du redoublement serait écartée une fois, elle pourrait revenir sur le devant de la scène un jour ou l'autre. Aussi, il est de bon sens d'aider l'enfant à mieux connaître ses aspirations professionnelles pour choisir la meilleure orientation, ou bien de recourir à des cours particuliers ou cours à domicile pour réduire ses difficultés scolaires.
Sources
- Conférence des directrices et directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP). « Répétition / Redoublement – Principaux résultats ». EDK/CDIP, https://www.cdip.ch/fr/systeme-educatif/organisation/enquete-aupres-des-cantons/b33-repetition-redoublement/hauptergebnisse/ Consulté le 6 déc. 2025.
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